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Le Pacte Vert Européen face aux bouleversements politiques

L’avenir du Pacte Vert Européen repose sur la capacité du nouveau Parlement européen et de la prochaine Commission européenne à naviguer dans un paysage politique et économique complexe.

Les récentes élections européennes, tenues du 6 au 9 juin 2024, ont ouvert la voie à une réévaluation critique du Pacte Vert Européen. Ce plan ambitieux, destiné à rendre l’Europe neutre en carbone d’ici 2050, se heurte à de nouveaux défis et opportunités à la lumière des résultats électoraux. Ces derniers reflètent non seulement un paysage politique en mutation, mais soulignent également la nécessité d’intégrer la durabilité environnementale dans des cadres socio-économiques plus larges.

Un paysage politique fragmenté

Les élections européennes de 2024 ont révélé un environnement politique complexe et en évolution. Les principales factions politiques, telles que le Parti Populaire Européen (PPE), l’Alliance Progressiste des Socialistes et Démocrates (S&D), et les Verts/Alliance Libre Européenne (Verts/ALE), ont connu des résultats variés. Le PPE a émergé comme le plus grand groupe, malgré une légère diminution de ses sièges, reflétant un électorat prudent face aux changements drastiques en période d’incertitude économique. Les Verts, en particulier, ont subi des revers notables, perdant du terrain qu’ils avaient gagné lors des élections précédentes. Ce recul met en évidence un virage vers des politiques plus centristes et de droite, fortement influencé par des questions pressantes telles que l’inflation et les prix de l’énergie[1].

Les résultats au Luxembourg

Au Luxembourg, les résultats des élections ont également marqué une dynamique intéressante. Le Parti Populaire Chrétien-Social (CSV) a conservé sa position dominante, tandis que les Verts ont subi une légère perte de sièges. Cette situation reflète une tendance similaire observée dans toute l’Europe, où les préoccupations économiques ont souvent pris le pas sur les priorités environnementales. Les résultats indiquent une nécessité pour les partis verts de réévaluer leur stratégie pour mieux adresser les préoccupations immédiates des électeurs tout en continuant à promouvoir des politiques durables[2].

Les défis du Pacte Vert Européen

Les objectifs ambitieux du Pacte Vert Européen doivent désormais être poursuivis dans un paysage politique plus fragmenté et économiquement tendu. La fragmentation politique signifie que la mise en œuvre de politiques environnementales complètes nécessitera une construction de coalitions soigneuse et des compromis. Les pressions économiques, notamment l’inflation élevée et les coûts de l’énergie, dominent les préoccupations des électeurs, nécessitant un équilibre entre les objectifs environnementaux et la stabilité économique[3]. Cet équilibre est crucial pour maintenir le soutien public et garantir que les politiques climatiques soient perçues comme améliorant, plutôt qu’entravant, la qualité de vie.

Intégrer la durabilité dans les systèmes gouvernementaux

Pour que le Pacte Vert Européen réussisse, la durabilité environnementale doit être intégrée dans les systèmes gouvernementaux et économiques plus larges. Cela implique d’intégrer l’action climatique dans les politiques fiscales, la planification économique, et les cadres réglementaires. Les gouvernements doivent démontrer que les initiatives environnementales peuvent stimuler la croissance économique et améliorer le bien-être social, répondant ainsi aux préoccupations des électeurs concernant la stabilité économique et la sécurité de l’emploi[4].

Un avenir incertain mais prometteur

L’avenir du Pacte Vert Européen repose sur la capacité du nouveau Parlement européen et de la prochaine Commission européenne à naviguer dans un paysage politique et économique complexe. L’engagement envers la neutralité carbone d’ici 2050 reste un objectif central, mais sa réalisation dépendra d’approches innovantes qui alignent la durabilité environnementale avec la stabilité économique et sociale. Les décideurs doivent s’assurer que les politiques environnementales soient équitables, bénéficiant à tous les groupes socio-économiques et protégeant particulièrement les populations vulnérables.

Les gouvernements locaux et régionaux joueront également un rôle clé dans ce processus. Un engagement accru à ces niveaux peut aider à adapter les politiques aux besoins locaux spécifiques, améliorant leur efficacité et leur acceptation publique. La mise en œuvre décentralisée du Pacte Vert peut répondre aux priorités diverses des différentes régions, favorisant un soutien plus large aux initiatives climatiques.

Conclusion

En conclusion, les élections de 2024 ont réaffirmé l’importance des questions environnementales tout en mettant en lumière les défis significatifs à venir. Les décideurs doivent adopter une approche équilibrée, intégrant la durabilité environnementale avec la stabilité économique et sociale pour assurer la mise en œuvre réussie du Pacte Vert Européen. En comprenant et en abordant les dynamiques politiques et économiques complexes révélées par les élections, l’Europe peut naviguer vers un avenir durable et inclusif.

Oriane Schoonbroodt
Oriane Schoonbroodthttps://www.label-r.com/
Oriane Schoonbroodt est partenaire de l'activité Stratégie ESG chez EY. Grâce à son leadership éclairé et à ses et sa vision stratégique de la direction, elle est un conseiller essentiel pour les clients des secteurs du capital-investissement et de l'immobilier, ainsi que pour les organismes gouvernementaux et les décideurs politiques. Avant de rejoindre EY, Oriane était Senior Director chez PwC Strategy& et Co-Founder and CEO of Label R, qui a créé un outil de due diligence et d'évaluation des risques ESG et éthiques pour les gestionnaires de fonds et leurs entreprises sous-jacentes. Oriane a également été diplomate et conseillère politique principale au Parlement européen et aux Nations Unies. Elle a cofondé la 8 Foundation, qui a développé des campagnes de communication pour soutenir les objectifs du Millénaire pour le développement (anciennement SDG). Oriane est également chargée de cours à l'Université du Luxembourg pour le nouveau Master en finance durable, ainsi qu'à HEC Liège pour le cours sur la modélisation des risques climatiques.

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