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Le congé parental au Luxembourg : un modèle envié en Europe

Le Luxembourg offre un congé parental flexible et généreux, contrastant avec les systèmes plus rigides ou moins avantageux de la France, la Belgique et l’Allemagne, malgré leurs réformes en cours.

En matière de congé parental, le Luxembourg s’impose comme une référence, non seulement par rapport à ses voisins, mais également à l’échelle européenne. Comparé aux dispositifs mis en place en France, en Belgique et en Allemagne, le modèle luxembourgeois se distingue par sa générosité et sa flexibilité, attirant ainsi l’attention de nombreux parents et experts en politiques sociales.

Au-delà de ces caractéristiques, ce modèle traduit une vision moderne des politiques familiales en Europe et ouvre des perspectives vers un avenir plus inclusif, même si des pistes d’amélioration sont encore possibles. Nous avons fait le point avec Noémie Dijon, chasseuse de têtes et spécialiste en ressources humaines à Luxemburg.

Un congé parental adapté aux besoins des familles luxembourgeoises

Depuis sa réforme de 2016, le congé parental au Luxembourg a été largement amélioré, afin d’offrir des options adaptées aux différents profils familiaux. Les parents peuvent choisir entre plusieurs formules, notamment un congé à plein temps de 4 ou 6 mois, un congé à temps partiel sur 8 ou 12 mois, ou une répartition fractionnée pouvant aller jusqu’à 20 mois. Cette flexibilité permet ainsi à un plus grand nombre de parents d’équilibrer leur vie professionnelle et familiale, sans compromettre leur niveau de vie.

« C’est d’ailleurs  l’un des atouts majeurs du Luxembourg », souligne Noémie Dijon. « Nous avons six manières différentes d’envisager le congé parental, ce qui permet à chacun de trouver une solution adaptée à sa situation. »

« Un congé parental devrait être considéré comme un onboarding à part entière. »

La situation en France : une réforme en 2025 pour plus d’égalité et de flexibilité

Si le Luxembourg se distingue par sa flexibilité et sa générosité, d’autres pays tentent également d’améliorer leur dispositif, à commencer par la France. À l’heure actuelle, le congé parental en France est régi par le dispositif PreParE (Prestation Partagée d’Éducation de l’Enfant). Ce système permet aux parents de s’arrêter de travailler jusqu’aux trois ans de leur enfant, avec une indemnisation plafonnée à 448,43 euros par mois – 732,98 euros pour les familles ayant au moins trois enfants, sous conditions. Cependant, cette indemnisation modeste limite son attractivité, en particulier pour les familles aux revenus moyens ou modestes.

Une réforme majeure est au programme pour 2025, avec, à la clé, plusieurs changements importants envisagés :

– Une réduction de la durée maximale du congé à six mois par parent (contre trois ans actuellement) ;

– Une indemnisation portée à 50% du salaire mensuel jusqu’à un plafond de 1 900 euros ;

– Un partage obligatoire du congé entre les deux parents.

Bien que cette réforme aille dans le sens d’une meilleure égalité, Noémie Dijon souligne : « Même avec ces ajustements, le système français manque encore de flexibilité. Le modèle luxembourgeois permet une adaptation bien plus fine aux réalités des familles. »

La Belgique : une approche plus équilibrée, mais perfectible

Le système belge offre un congé parental plus flexible que celui de la France. Chaque parent a en effet droit à 4 mois de congé parental par enfant, utilisables à temps plein, à mi-temps ou à 1/5e temps. L’indemnisation, bien que plus élevée que celle de la France, reste toutefois modeste : environ 1 166 euros par mois pour un congé à plein temps. Malgré une meilleure flexibilité que la France, l’indemnisation reste un frein pour de nombreux parents. De plus, les démarches administratives peuvent être complexes.

L’Allemagne : un modèle flexible mais moins avantageux financièrement

En Allemagne, le congé parental est d’un an, avec une possibilité d’extension à 14 mois si les deux parents en bénéficient. L’indemnisation est calculée en fonction des revenus précédents, couvrant entre 65% et 100% du salaire net, avec un plafond de 1 800 euros par mois. Toutefois, si l’Allemagne incite fortement les pères à prendre leur congé, le montant de l’indemnisation peut être un frein, notamment pour les familles à revenus plus modestes.

« […] les entreprises devraient valoriser les employés qui en bénéficient et montrer des exemples de parcours réussis après un congé. »

La réalité du retour au travail : un enjeu majeur

Le retour en entreprise après un congé parental reste un défi. « Un congé parental devrait être considéré comme un onboarding à part entière », explique Noémie Dijon. « Beaucoup de choses changent en quelques mois : la personne a une nouvelle organisation familiale, de nouveaux besoins. Des choses peuvent également avoir changé au sein de la société, de nouveaux process, etc. Idéalement, il faudrait mettre en place un suivi structurant avec un récapitulatif des évolutions internes, une réunion avec le manager et un système de mentorat avec un collègue ayant vécu une expérience similaire. »

Des améliorations encore possibles

Malgré ses nombreux avantages, le congé parental au Luxembourg pourrait encore être optimisé. Noémie Dijon identifie plusieurs pistes d’amélioration :

Plus de flexibilité en cours de congé : « Si un parent réalise après trois mois que ce n’est pas pour lui, il ne peut pas reprendre son travail sans devoir rembourser les indemnités perçues. C’est une rigidité qui pourrait être revue. »

Allongement du congé paternité : « Actuellement de dix jours, il est bien en deçà de ce qui est pratiqué ailleurs en Europe, comme en France où il atteint un mois. »

Un meilleur accès aux structures de garde : « À l’heure actuelle, inscrire son enfant en crèche publique relève du parcours du combattant. Certains parents doivent se tourner vers des structures privées coûteuses. »

Vers un modèle européen inspiré du Luxembourg ?

C’est un fait, le modèle luxembourgeois, combinant soutien financier, flexibilité et acceptation sociétale, pourrait inspirer d’autres pays européens. « Les entreprises ont aussi un rôle clé à jouer, explique Noémie Dijon. Quand certaines multinationales appliquent leurs propres politiques de congé parental, plus avantageuses que la législation locale, cela peut engendrer une dynamique qui encourage les États à adapter leur cadre juridique. Spotify, par exemple l’a fait en offrant six mois de congé parental à ses employés dans le monde. »

Enfin, elle rappelle l’importance de normaliser la parentalité dans le monde du travail : « Prendre six mois de congé parental, c’est insignifiant sur une carrière de trente-cinq ans. Plutôt que de l’assimiler à un frein, les entreprises devraient valoriser les employés qui en bénéficient et montrer des exemples de parcours réussis après un congé. »

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