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CubeSat, l’alternative pyroélectrique aux panneaux solaires

Avec une telle mission, le LIST diversifie son portefeuille de projets de recherche dans le domaine spatial. D’autres projets sont aussi déjà dans les tiroirs, que ce soit avec l’Agence Spatiale Européenne (ESA), des industriels européens ou des partenaires luxembourgeois.

Remplacer les panneaux solaires qui équipent les satellites par une technologie pyroélectrique ? Avec le projet CubeSat, le LIST veut tester dans l’espace une technologie développée in house de transformation des modulations de température en électricité. Une mission qui, si elle est un succès, pourrait déboucher sur des opportunités commerciales. Et asseoir la crédibilité du LIST dans le domaine spatial.

« Cette nouvelle technologie pyroélectrique pourrait constituer un changement de paradigme en remettant en question, voire remplacer, la technologie des panneaux solaires », s’enthousiasme Jérôme Polesel, responsable technologie et innovation au LIST (Luxembourg Institute of Science and Technology) et coordinateur scientifique du projet CubeSat.

Ce projet CubeSat vise à envoyer dans l’espace, via un nanosatellite de 1,2 kilogramme, un capteur d’énergie thermique intégrant des matériaux pyroélectriques développés au sein du LIST par le groupe de recherche Ferroic Materials for Transducers dirigé par Emmanuel Defay – une technologie qui a récemment reçu la prestigieuse subvention du Conseil européen de la recherche (ERC) , attribuée aux meilleurs chercheurs d’Europe.

La récupération d’énergie pyroélectrique consiste “à transformer des modulations de température en puissance électrique utile”, explique Jérôme Polesel. En pratique, au cours de son orbite autour de la Terre, l’exposition solaire du satellite varie. Sa surface exposée au vide spatial est ainsi alternativement réchauffée par rayonnement par le soleil puis refroidie lorsqu’elle est obscurcie par la Terre lors de la phase d’éclipse. « Nous tirerons parti de cette modulation de température pour récolter de l’énergie électrique qui sera mesurée en temps réel par l’électronique du satellite. Ces informations seront ensuite acheminées sur une station au sol pour tirer des conclusions sur la performance du dispositif après plusieurs mois d’orbite », explique Olivier Bouton, ingénieur au LIST et coordinateur projet.

« C’est un pari ambitieux que nous nous lançons de mener à bien une mission scientifique dans l’espace de A à Z. »

Des rendements de conversion “extraordinaires”

Quelle est la plus-value d’un tel système par rapport aux panneaux solaires, qui équipent et fournissent en énergie la plupart des satellites ? Les images des panneaux solaires de la station MIR en fin de vie, perforés de toutes parts, donnent un aperçu de leur vulnérabilité. « L’idée est d’avoir une technologie de récupération d’énergie qui est robuste par rapport à l’impact balistique des débris en orbite dans l’espace, et résistante au vieillissement des matériaux par les rayonnements cosmiques », explique Jérôme Polesel.

Une telle technologie pourrait ainsi compléter les panneaux solaires – voire les remplacer, d’autant qu’une telle alternative pourrait in fine s’avérer plus efficace. « Les rendements de conversion sont déjà très prometteurs sur des systèmes terrestres », assure ainsi Jérôme Polesel.

« C’est un pari ambitieux que nous nous lançons de mener à bien une mission scientifique dans l’espace de A à Z. Si celle-ci est un succès, nous aurons une plateforme éprouvée pour de prochaines  expériences scientifiques en cours de développement au LIST. »

Lancement prévu en janvier 2026

Mais encore faut-il démontrer les performances du système dans l’espace. « Il faut mettre cette technologie face à l’environnement rude du milieu spatial », explique Jérôme Polesel. Or, « c’est la première fois qu’une telle technologie de collecte d’énergie sera mise en œuvre dans un satellite », observe-t-il. « Donc c’est une expérience phare aussi dans ce sens. »

Si l’idée de ce projet avait émergé dès 2021, son lancement a officiellement eu lieu en septembre 2023, avec une mise en orbite du satellite prévue pour le premier trimestre 2026. Quant à l’exploitation de la mission dans l’espace, « le suivi des performances du système de récupération d’énergie pyroélectrique aura lieu sur plusieurs mois, voire sur une année complète », prévoit Olivier Bouton.

« En termes de business et de marché pour le secteur spatial, il y a un enjeu pour compléter la récupération d’énergie photovoltaïque conventionnelle. »

Prendre les risques pour l’industriel

Si la mission est un succès, de potentielles exploitations commerciales pourraient voir le jour. Au Luxembourg, la stratégie spatiale nationale n’est en effet jamais très éloignée de son versant business. « Dans les missions du LIST, il s’agit aussi de répondre aux attentes de l’industriel », confirme Jérôme Polesel. « Le LIST dans sa mission de RTO prend les risques pour l’industriel. »

Avec un tel système, plus compact, plus robuste face aux débris spatiaux et avec une durée de vie améliorée par rapport aux panneaux solaires, « en termes de business et de marché pour le secteur spatial, il y a un enjeu pour compléter la récupération d’énergie photovoltaïque conventionnelle par la technologie du LIST. Un de nos partenaires industriels nous a confirmé cette opportunité de marché », assure Jérôme Polesel.

Diversifier le portefeuille de projets spatial du LIST Mais l’enjeu commercial n’est pas le seul. Avec une telle mission, le LIST vise aussi à élargir ses types de projets dans le domaine du spatial. Avec le European Space Resources Innovation Centre (ESRIC), une entité conjointe du LIST, de l’Agence Spatiale Luxembourgeoise (LSA) et de l’Agence Spatiale Européenne (ESA), l’institut couvre déjà l’ensemble de la chaîne de valeur. En outre, le LIST s’est récemment associé à EARTHLAB Luxembourg pour améliorer les applications basées sur la géo-information et a mis en place des solutions de télédétection en soutien à l’aide humanitaire dans le monde à la faveur de sa technologie brevetée : HASARD®. Le projet CubeSat permet donc au LIST d’ajouter une corde supplémentaire à son arc.  D’autres initiatives sont d’ailleurs déjà dans les tiroirs, que ce soit avec l’Agence Spatiale Européenne (ESA), des industriels européens ou des partenaires luxembourgeois.

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